Au fil de soi, L'illusion d'une passion
Editions Dricot, octobre 2015
Un conte des sept nuits... Il avait de grands yeux noirs, des cheveux noirs, une âme un peu noire aussi. Il lui chantait de sa belle voix grave des chansons de son pays, sur l'oreiller, jusque tard dans la nuit.
Ce qui se devait d'être une idylle n'en est pas une pour Iléna. A son retour en Europe, la jeune femme s'entête à retrouver la trace de l'homme aimé laissé en terre marocaine. Leur histoire peut-elle se conjuguer à tous les temps? Ou l'illusion de l'amour ne tient-elle qu'à un fil?
Trente-six lettres, échangées à trois mille kilomètres de distance et de culture, tissent la trame de cette passion épistolaire.
A l'heure d'internet et du téléphone portable, est-il encore pensable d'écrire avec une plume des lettres d'amour ? Il se passe pourtant chaque jour sur la toile des milliers d'histoires "épistolaires" qui restent bien souvent du domaine du rêve. Et les relations de couple entre cultures différentes, complexes et fragiles, sont d'une sensible actualité.
L'auteur nous emmène en voyage dans les ambiances et les paysages flamboyants du Maroc, en voyage d'amour, en voyage de vie... au fil de soi.
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Une rencontre à Marrakech, entre Iléna et Khalil, qui se devait d’être éphémère, va se poursuivre par lettres pendant plus de 5 ans, à une époque où il n’y avait ni téléphones portables, ni courriels, où les coups de téléphone internationaux étaient onéreux. C’était il y a un peu plus de vingt ans, pas cinquante...
Intitulé « Au fil de soi », le récit se veut aussi une réflexion de la narratrice sur la passion, l'illusion, la cécité, de l’état amoureux – ne « tombe »-t-on pas amoureux ? - au prix d’une certaine souffrance, sur ce qui sous-tend nos comportements amoureux, faisant allusion aux conséquences de l’enfance sur notre vie affective (en référence à un livre précédent de l’auteur « Je n’ai pas donné la vie »).
Au moment même où est sorti le film « Mon roi » de Maaïwen sur les ravages de la passion, voici un livre dont l’héroïne s’estime pareillement enrichie des enseignements que sa folle aventure lui a apportés, et qu’un événement totalement inattendu, près de vingt ans plus tard, est venu corroborer, donnant au titre pleinement son sens.
Pour en parfaire l’atmosphère, le livre a été enrichi de calligraphies en langue arabe de mots qui s’imposent comme les mots-clés du récit, l’illustration de la couverture est également une calligraphie de la transposition du titre en arabe.
EXTRAITS
La musique, surtout, l’enchante. Il est stupéfait que je n’aie jamais entendu parler du chanteur algérien Cheb Khaled et se met à fredonner les plus connues de ses chansons d’amour. Sa voix magnifique tournoie, dans la tiédeur du soir étoilé.
Nous passons une partie de la nuit à parler, à rire. C’est bon de l’entendre dire : « Il y a longtemps que je n’ai pas ri comme ça ! ».
Il ose une étreinte. Puis un baiser.
Je ne lui dis pas : Khalil, tu as vingt-et-un ans, tu es musulman et tu me troubles profondément.
Il est tendre et sensuel. Sa sensibilité exacerbée me touche : le blanc, c’est la couleur de l’innocence, pour lui c’est la couleur du mensonge, car rien n’est innocent. Sa lucidité sur la vie le mène parfois jusqu’au cynisme. Viril, il ne supporte pas que je me fasse du souci pour lui. Je voudrais connaître sa maison, son village où les nuits sont si belles qu’il préfère ne pas dormir. Il a de grands yeux noirs, des cheveux noirs, une âme un peu noire aussi. Il chante de sa belle voix grave, si grave pour un homme si jeune, des chansons de son pays, sur l’oreiller, rien que pour moi.
Nuit entière d’amour avec Khalil.
Instants suspendus, privilégiés. Nous avons si peu de temps...
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C’est bel et bien un palais somptueux que
recèlent ces murs vétustes. L’intérieur est intact et je reste stupéfaite de la merveille qui s’offre à mes yeux. La légende rapporte que trois cents ouvriers ont travaillé pendant trois ans pour
décorer murs et plafonds. Les ghobbars se sont surpassés pour ciseler les stucs qui ornent les passages de fines dentelles de plâtre. Les céramiques posées sur les murs et les colonnes rutilent
de bleu, de jaune, de vert et de rouge. Nous marchons sur des sols clairs de céramiques en losanges. Les pièces, dénuées de tout mobilier, se déroulent en enfilade, sous des plafonds sculptés de
cèdre peint. Chaque fenêtre est enclose dans quatre volets dorés. Dans l’ogive parfaite d’une grille ouvragée en fer forgé s’encadre, en contrebas, le village de maisons de terre, serrées autour
du minaret.
Je suis éblouie par la richesse prodigieuse de la décoration que rien de
l’extérieur ne laisse soupçonner. Les mots me manquent pour dire mon émerveillement et je voudrais déambuler des heures dans ce palais des mille et une nuits où nous sommes seuls, à contempler ce
chef-d’œuvre de savoir-faire et de perfection. Mais il nous faut gagner Ouarzazate avant la nuit.
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ILÉNA Á KHALIL
Le 25 décembre 1996
Khalil de toujours,
J’ai vécu ton appel, cette nuit
de Noël, comme un rêve. Tu étais proche de moi comme si aucune distance ne nous avait séparés. J’étais dans tes bras.
Peu importe que tu m’aies réveillée, j’ai entendu des choses belles, que tu ne m’avais jamais
dites.
C’était toi, Khalil que j’ai effleuré quelques nuits et à qui un fil indéfinissable m’unit aux confins de l’univers.
Si, comme tu me l’as exprimé, tu viens un jour me voir, ce sera un enchantement de t’accueillir dans ma douce
maison.
Je dépose sur ton cœur des souhaits de bonheur et d’amour, puisses-tu trouver la satisfaction qui manque
cruellement à ta vie depuis longtemps.
J’embrasse tes chères lèvres qui
m’ont dit cette nuit de si précieuses paroles d’amour, que j’enferme à double tour dans mon cœur d’ivoire.
Et que ton dieu veille sur toi,
et sur ton bonheur,
Iléna
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L’amour n’est pas seulement une régénération, c’est un devoir impérieux, inéluctable. Aux hommes qui ne l’ont jamais connu, il manque quelque chose. Franz Liszt
Ce que la presse en a dit
A l’heure où Internet règne en souverain, est-il encore possible d’écrire de belles et longues lettres d’amour avec de l’encre et une plume ? Myriam Buscema entraîne le lecteur dans un conte des sept nuits au Maroc, dans des paysages ensoleillés. De retour en Europe, la jeune femme ne parvient pas à tirer un trait sur une idylle et se met en quête de retrouver son bel amant abandonné à Marrakech. Entre récit épistolaire et narration traditionnelle, on découvre une nouvelle fois les ravages de la passion sur une personne amoureuse et prête à tout pour renouer avec celui dont l’absence troue la vie.
Georgie Bartolomé - Bruxelles News, février ‘16